Le détroit de Magellan avalé à vitesse grand V et après une escale de 24h dans la ville de Punta Arenas, nous voilà reparti pour le Cap Horn*.

  La météo en dessous du 50ème parallèle est normalement très changeante et les prévisions fiables à plus de 24h heures relèvent de la science-fiction. Mais là une météo exceptionnellement calme et constante pour la saison nous incite à partir vite pour profiter de cette fenêtre qui s’offre à nous.

  Les pleins d’eau et de carburants sont faits avec l’aide de l’Armada Chilienne qui nous véhicule gentiment avec nos bidons de gasoil. Faut dire que porter à la main 420 litres en bidon de 20 et 30 litres relève plus de l’haltérophilie que de la navigation.

 Nous partons en milieu d’après-midi dans le canal de Magellan (lire à ce sujet l’excellente biographie que Stephan Zweig a écrit sur Magellan) en direction du sud. Laissant le canal continuer vers l’ouest en direction du Pacifique, nous nous engouffrons vers le sud sur le canal Magdalena puis sur celui de Cockburn au petit matin.

53°, 54° parallèle…on s’approche on s’approche. Beaucoup d’émotions ce matin-là à la vue des paysages qui s’offrent à nous. Depuis plus de 2 mois, l’air est sec, les paysages lunaires, le vent transporte la poussière nous tannant la peau. Ce matin le décor est incroyablement vert, la végétation est revenue avec de vrais arbres. Les montagnes et les glaciers sont là ! On sent qu’on y est ! La brise nous permet de rentrer dignement dans le Pacifique toutes voiles dehors et nous décidons d’aller directement du Horn sans passer par les canaux au grand étonnement d’un officier de l’Armada à qui j’ai donné mon parcours à Punta Arenas et qui ne comprenait pas pourquoi je prenais le risque de passer par le Pacifique alors que les charters passent par les canaux protéger de la houle et des vents de l’Océan.

  Oui mais voilà nous ne sommes pas en charter et le Cap Horn il se mérite, alors on va se le faire comme il se doit et avec tout le respect qui lui est dû. Si seulement le vent voulait bien exaucer nos vœux et gonfler un peu les voiles ça serait encore mieux.

  Quelques heures après être rentré sur le Pacifique, le vent s’arrête brutalement et c’est au moteur que nous longeons la côte du grand Sud ! %#@¤~§ faire tout ce chemin pour ne pas se prendre le coup de vent tant attendu et tant redouté, on serait presque déçu.

  Quelques heures avant le Cap Horn, un grain nous permet de mettre les voiles et de rincer nos vestes de quarts de la poussière qui s’y accumulait.

  Ça y est le voilà. En plein soleil. Il est beau. Il est fort. Il en jette le bougre !

  C’est tout un symbole d’être là, d’être venu de si loin, d’avoir surmonté tant de difficultés. Bref…on est content !

  La météo est tellement clémente que nous décidons de mouiller l’ancre au pied du phare du Cap Horn. Un luxe dont on ne va pas se priver, ni se priver non plus d’arroser ça au champagne (qui s’avère être un très bon blanc pétillant qu’on m’avait offert au Brésil).

Après une visite au monument des Cap-horniers, et au phare/musée nous repartons vers le nord en direction de Puerto Williams via le canal Beagle et ses paysages à couper le souffle.

We did it!

*Cap Horn ainsi baptisé lors de son premier franchissement en 1616 par Jacob le Maire et Willem Cornelisz Schouten, les deux navigateurs Hollandais en référence à la ville de Kaap Hoorn dont ils étaient originaires. Le nom a été ensuite hispanisé en Horno (un four).